Cette boîte demi-ovale, ornée
d'un soleil rayonnant (selon nous choisi pour sa métaphore
du feu) et d'un buste de fumeur de pipe
en terre, est un porte-fidibus.
De tels objets de dinanderie,
que l'on posait ou accrochait au mur, contenaient
de longues mèches rigides : les fidibus. Ancêtres
de l'allumette, ces petites tiges de bois ou ces papiers enroulés
en bâtonnets étaient destinés
à transporter le feu de l'âtre à la pipe que
l'on voulait allumer.
Depuis l'apparition de la pipe en Europe
et durant toute la renaissance, on se servait de ces accessoires
pour donner le feu. Les porte-fidibus pourraient dater de
cette époque...
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Porte-fidibus mural en laiton repoussé
(décor de fumeur, soleil rayonnant)
d'après une lithographie de Boilly
Nord de la France,
circa 1840
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Le porte-fidibus... garni de fidibus,
des papiers enroulés en bâtonnets
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Le mot même de "fidibus"
demeure une énigme.
Ce mot ne figure pas dans les dictionnaires français comme
le Littré ou le de La Châttre. Pour
en savoir plus il faut se référer au fameux dictionnaire
allemand de Grimm qui situe l'éclosion du fidibus parmi les
nombreuses corporations estudiantines de son pays. Ces corporations
avaient toutes la même devise "fidibus-fratribus"
(fidèles et fraternels). Ce mot serait donc une corruption
de cette devise latine.
Selon d'autres, "fidibus"
serait la déformation des mots français, "fil
de bois" !
Le débat reste ouvert ...
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En laiton repoussé, le décor
de notre exemplaire est inspiré de l'un des personnages de
la lithographie de Boilly, "Les Fumeurs et les Priseurs",
exécutée vers 1825. Cette dernière représente,
sous forme de bustes enchevétrés, trois fumeurs, une
femme prisant tabatière à la main et une autre sur
le point d'éternuer !
Manque à notre porte-fidibus
le nuage de fumée que l'artisan a représenté
à la manière des bulles de nos bandes dessinées.
Celui-ci est cassé au ras de la bouche du pétuneur.
Le peintre Louis-Léopold Boilly
(La Bassée près de Lille, 1761 - Paris, 1845), également
dessinateur, miniaturiste, graveur et lithographe s'est
illustré dans ces représentations de la vie quotidienne.
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Pipe en terre aux lèvres,
tabatière à la main
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Le porte-fidibus et son assemblage
de feuilles de laiton soudées
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Très populaires, ces chefs-d'oeuvre
de l'imagerie populaire qui caricaturaient ses contemporains ("Les
Lunettes", "Les Amateurs de Cafés", "Ah,
qu'il est bon !", montrant cinq priseuses en action ...) étaient
déjà collectionnés de son vivant. Il
n'est donc pas étonnant que la lithographie "Les Fumeurs
et les Priseurs" aient été choisie pour orner
une paire de porte-fidibus !
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Ce porte-fidibus a en effet un pendant,
orné du même soleil sur le pot et d'une vieille femme
en train de priser en effigie.
Ce personnage se retrouve également, accompagné
de feuilles de vigne et de grappes de raisin, sur des pots à
tabac en grès.
Il existe des variations à cette
paire de porte-fidibus.
Nous avons déjà rencontré des
pièces uniquement destinées à être posées,
car démunies d'un trou de suspension...
Des détails dans l'ornementation
peuvent également différer. L'ex-Seita (aujourd'hui
Altadis) possédait dans ses collections, sous les numéros
441 et 442, une paire de porte-fidibus dont le bord supérieur
du pot, en encadrement du soleil, est orné d'une ligne de
cercles concentriques, estampés en creux. La veste du fumeur
ne comporte pas de boutons, à l'inverse de notre exemplaire.
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"Mère et fils"
( belle lithographie
rehaussée à la main : E. Leroux,
Imprimerie de Guillet)
XIXème siècle, France
Au coin du feu, pensif, un grognard
fume une terre. Un sabre, un bicorne
et une gravure du "petit caporal"
rappellent son passé militaire...
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Un rare témoignage graphique : accroché
à la paroi de la cheminée, un porte-fidibus !
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On date généralement ces porte-fidibus
inspirés de Boilly des années 1840.
Pourquoi ne pas proposer une fourchette plus basse, celle de l'apparition
de la lithographie de Boilly , ... mystère !
Ces objets tabagiques seraient originaires
du Nord de la France.
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Fidibus à la main, un garçonnet
allume sa pipe en bois
( carte affranchie le 29 avril 1906)
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Le peintre Gustave Courbet
(1819 - 1877) allumant sa pipe
en terre à l'aide d'un fidibus,
par le caricaturiste André Gill
(Couverture du journal l'Eclipse)
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Sources :
ANONYMES (réunion d'auteurs), Histoire
du tabac et de ses usages, Musée du Seita, catalogue,
Paris, 1979
ANONYMES (réunion d'auteurs),
Histoire du tabac et de ses usages, musée - galerie
de la seita, catalogue, Paris, 1992
CLERGEOT Bernard, Tabac et sociétés
II : L'herbe de tous les Maux, 2nd tome du catalogue raisonné
du Musée d'Anthropologie d'Intérêt National
du Tabac de Bergerac, Ville de Bergerac, 1991
DELALANDE Dominique, La fleur du mal
- cinq siècles d'objets d'art autour du tabac, 16
septembre - 19 février 1995, Trianon de Bagatelle, Paris,
1994
FAVETON Pierre, Autour du tabac -
Tabatières, Pipes, Cigares, Allumettes et Briquets,
Paris, Ch. Massin Editeur, 1988
JAKOVSKI Anatole, L'épopée
du tabac, Editions d'Art et d'Industrie, Max Fourny, Paris,
1971
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